Odyle Collin-Dumonteil a quitté notre monde terrestre en ce 20 Décembre 2022.
Cette page de blog est dédiée à sa mémoire.
…Je (SD) vais y copier-coller d'abord le message (avec ses liens) que j'ai envoyé à ses amis du groupe théâtre brindasien Les Deux Masques dont elle était la présidente.
Puis la "
biographie" rédigée peu après pour la cérémonie de funérailles… Et on complètera au fur et à mesure par divers témoignages, car par sa grande humanité, instinctive et profonde à la fois, Odyle a marqué durablement nombre de celles et ceux qui ont croisé son chemin.
[PS: "Vivre en poésie"] Odyle n'était pas du tout une théoricienne, et son credo, c'était juste d'agir, et agir juste… C'était comme une sorte d'instinct qui l'animait pour entreprendre les choses qu'elle avait en tête, sans jamais trop s'encombrer de discours. Certain(e)s ont su trouver les mots pour décrire ses belles actions, voir notamment sur cette page les textes évoquant son travail en psychiatrie… Mais pour elle, les mots les plus passionnants, c'était ceux de la poésie, et la magie de leurs assemblages mystérieux. La poésie qui est restée la forme d'expression/d'art qui l'aura accompagnée toute sa vie, depuis (et même bien avant) la parution de son recueil "Naufrage" (auto-produit chez Audin en 1974) et jusqu'à ces quelques douloureux (mais toujours dignes) poèmes suscités par la maladie ces dernières années. Et d'ailleurs, même bien au delà de l'écriture, on pourrait dire qu'Odyle aura d'une certaine manière toujours vécu "en poésie", et, par bonheur, j'ai eu la chance de partager cet enchantement*…
Serge Dumonteil
[*ce qui n'est pas forcément toujours synonyme de 'long fleuve tranquille'!]
Sincères remerciements pour les très nombreux messages de condoléances, les témoignages de sympathie souvent très touchants, les fleurs si belles et nombreuses, etc. (de la part de Serge, Emmanuel, Olivier, Mariane…)
NB: Il est possible d'ajouter une note en commentaire au bas de cette page (cliquer d'abord sur son titre pour qu'elle soit la seule page ouverte) (et même sans connexion, en "anonyme", vous pouvez alors glisser votre nom avec le texte).
[Cliquer sur les liens ci-dessus pour descendre vers l'article sur la page]
(Mail aux membres des Deux Masques)
Salut l'Artiste…!
« Désolé de vous annoncer une aussi mauvaise nouvelle à la veille de Noël… Mais Odyle nous a quittés ce Mardi 20-12, deux jours avant son anniversaire (aujourd'hui le 22), et c'est probablement pour elle un soulagement au terme d'une cruelle maladie qui l'aura fait souffrir pendant une dizaine d'années. Une "AMS" (maladie rare, un syndrome parkinsonien encore plus radical que la maladie de Parkinson), qu'on pourrait résumer en une sorte de paralysie progressive. Ces derniers jours elle ne pouvait plus du tout communiquer, même plus moyen de lever seulement le pouce pour acquiescer comme elle avait pris l'habitude de le faire…
Odyle avait toujours eu "la fibre artistique" et Les Deux Masques avaient représenté pour elle un moyen de refaire du théâtre qu'elle avait un peu pratiqué dans sa jeunesse… Elle était présente dès les débuts de l'association en 1991 puis en était devenu la présidente au début du nouveau siècle… Et elle avait régulièrement joué jusqu'en 2012 avec "Feu Monsieur de Marcy" [Youtube], où elle commençait à ressentir des problèmes avec sa voix… Parallèlement, elle s'était occupé aussi d'un atelier-théâtre dans le cadre de son travail à la Clinique de Vaugneray, avec lequel elle organisait notamment des spectacles chaque année, réunissant malades et soignants (en psychiatrie). Il en est question sur cette page du site Guignolsland, un site que d'ailleurs au départ j'avais créé comme une "page perso" au nom d'Odyle Collin (sur ses activités artistiques !), et que j'ai élargi ensuite à Brindas et Guignol (mais aujourd'hui un peu abandonné…). Plus tard, malade et sous l'égide de France Parkinson elle avait monté, devinez quoi… un groupe théâtre dont la principale réalisation avait été un spectacle donné à la Croix-Rousse en 2016 : "Embarqués… sur la route de Parkinson".
Il faut ajouter qu'Odyle avait aussi joué (relativement récemment, donc déjà malade) plusieurs fois avec la troupe de la MJC de Vaugneray.
Elle s'était (re)mise aussi à la peinture, surtout à partir de la retraite. Elle a dû s'arrêter trop vite bien sûr à cause de ses paralysies… Un lien par ici une page du blog qui parle de ses peintures. …»
SD
PS: Et on a oublié ici de parler des poésies…! Voici une page où vous pourrez en trouver quelques unes à ouvrir.
(Lu par Olivier à la cérémonie, religieuse, du 28-12)
ODYLE Collin-Dumonteil (1950-2022)
Une petite 'biographie'…
Odyle est née le 22 Décembre 1950 à Dijon, deux ans après sa sœur Elisabeth. Leurs parents Suzanne et René vivent aux Laumes en Côte d'Or… Dans la plaine les voies ferrées et les cités, et sur la colline d'Alise la monumentale statue de Vercingétorix commandée par Napoléon III… Le père travaille à la SNCF, forcément… La petite Odyle se découvre très vite un tempérament d'artiste et à l'adolescence elle choisit de mettre un "y" à son prénom pour mieux se singulariser…!
Elle commence à travailler dès 18 ans dans divers centres pour handicapés mentaux entre Bourgogne et Saône-et-Loire, généralement tenus par des religieux. Et elle ne déviera jamais de ce sacerdoce. En 1971 elle participe au premier pèlerinage à Lourdes de Foi et Lumière. Fin 1973, elle arrive à Lyon car elle a pu trouver un emploi à l'Hôpital du Vinatier où elle restera près de dix ans. Ceux qu'on appelle encore "les fous" sont pour elle source de lumière…
…Même si parallèlement elle se met à pratiquer une vie de noctambule qui la voit courir la ville toute la nuit et chanter Piaf ou Bruant à Saint-Jean dans des lieux comme le Café du Soleil. Mais la rencontre avec Serge en 1975 la déviera de cette voie qui aurait pu devenir problématique. Après s'être croisés à un concert de Chuck Berry, ils se sont mieux connus lors d'une exposition appelée "L'Aube" organisée à la MJC des Etats-Unis par un ami commun. Elle y présentait ses dessins et poèmes et lui ses photos.
Dès le mois de Mai ils vivent désormais ensemble dans leur 5e étage (sans ascenseur) dans le centre de Lyon. En 1976, elle passe ses examens pour devenir officiellement infirmière de secteur psychiatrique (les épreuves écrites se déroulaient dans la salle du Palais d'Hiver!). Leur premier garçon, Emmanuel, naît en 1977 à l'Hôtel-Dieu de Lyon. Lassés de la ville, en 1983 ils viennent s'installer à Brindas (où vivent les parents de Serge) chemin de Moncel. Leur second garçon, Olivier, naîtra en 1985 à Oullins. Le Vinatier étant trop éloigné, Odyle a pu trouver un emploi à la Maison de santé de Vaugneray, où elle se rend les premiers temps sur sa mobylette orange…! Elle y deviendra une cheffe de service très appréciée par ses infirmières, et elle y créera un atelier-théâtre organisant des spectacles qui réunissaient régulièrement soignés et soignants.
Entretemps, à Brindas elle était devenue un des éléments fondateurs de la troupe des Deux Masques dès les débuts en 1991, dont elle deviendra la présidente plus tard. À sa retraite en 2011, elle s'orientera aussi vers la peinture…
Mais la maladie qui apparaît progressivement dès 2013 (une
AMS, on le saura plus tard, maladie rare et syndrome parkinsonien encore plus cruel que la maladie de Parkinson elle-même qu'on lui avait diagnostiquée d'abord, à tort) viendra troubler ses activités et sa vie même bien sûr. À commencer par le théâtre, car la voix ne répond plus… Sous l'égide de France-Parkinson elle créera tout de même… un groupe théâtre encore, mêlant toujours soignés et soignants et qui donnera en 2017 à la Croix-Rousse un spectacle intitulé "
Embarqués, sur la route de Parkinson"… Un très douloureux chemin de maladie en fait, dont l'issue aujourd'hui représente sans doute une délivrance pour elle…
SD
Un très grand merci bien sûr à tout le personnel médical, et spécialement aux infirmières à domicile, sans oublier les personnes de l'ADMR…
43 ans de bonheur avec 'les fous'
Ce texte (également lu à la cérémonie) évoque les projets d'Odyle menés au sein de la
clinique (psy) de Vaugneray…
Chère Odyle,
Nous avons passé tant de temps ensemble à la clinique de Vaugneray, au service des patients. Pascale depuis 1995, Michelle depuis 1994. Tant de souvenirs se bousculent dans nos têtes, les ateliers de peinture, de théâtre… Pour l’atelier théâtre, tout commençait par des ateliers d’écriture. Les patients et nous-mêmes composions des textes, autour d’un thème que tu avais proposé. Je n’oublierai jamais de quelle façon tu jonglais avec les mots pour les lier et créer une pièce cohérente que nous jouions en fin d’année.
Quelques cartons, quelques pots de peinture, trois bouts de ficelle et quelques accessoires glanés à Emmaüs, les lumières de Jean-Louis, et le décor prenait forme, grâce à toi et à ton ingéniosité, les patients se transformaient et se dépassaient pendant ces heures-là. Tu savais enthousiasmer la direction de la clinique qui nous suivait dans le projet.
Accompagnées par d’autres soignants, nous avons participé à des festivals et sommes partis avec les patients jouer nos créations à Lyon, Grenoble, Rouen même… Sans oublier le film que nous avions présenté à Paris… Nous en avons fait des kilomètres en minibus, et combien de péripéties nous avons vécues.
De ces heures passées ensemble, nous retiendrons surtout ton humanité, ta sérénité auprès des patients et surtout ce grain de folie, ce grain de créativité qui leur a permis d’approcher ce qui était vivant en eux à travers la peinture et à travers le théâtre.
Merci Odile pour ton ingéniosité, ta générosité, ton courage.
Odile, nous ne t’oublierons pas.
Pascale Montagnon-Payant et Michelle Perrachon
Nous voulons aussi témoigner notre sympathie et notre admiration à Serge qui l’a si bien accompagnée dans sa fin de vie si douloureuse.
"
Sainte Odyle du Vinatier"…
Sur la période d'Odyle
au Vinatier (avant 1983) on a retrouvé
ce témoignage de Marie-Thérèse Peyrin, sur le blog de son association (littéraire, artistique, et d'abord féminine bien sûr)
La Cause des Causeuses (qu'Odyle avait évidemment ralliée). À la lecture de ce texte, j'aurais presque l'impression d'avoir vécu ces presque 50 ans aux côtés d'une sainte, ce qui n'était peut-être pas tout à fait le cas… [Encore que…] [SD]
Extrait (MTP appelle Odyle "Mon Amie")…:
«…Les services les plus difficiles étaient souvent désertés par le corps médical, et redoutés par les personnels subalternes... C'est pourtant là que se trouvaient les clés de compréhension de la nature humaine et de ses besoins fondamentaux. C'est là que le métier rentrait le mieux en même temps que l'humilité et le courage. Mon Amie le savait et c'est pour cela qu'elle avait accepté la mission d'organiser des activités pour des malades extrêmement démunis et perturbés psychiquement, certains sans langage verbal articulé. Une gageure, un défi fou... une utopie sans doute, mais elle y croyait et le prouvait chaque jour en organisant pour les plus régressé.e.s, ce que j'appelais avec un humour un peu douteux, son "école maternelle à perpétuité", et pour les autres, des activités ergothérapiques "occupationnelles"... Son enthousiasme, sa créativité et sa douceur tranchaient avec les attitudes très défaitistes des autres membres de l'équipe, mais elle savait attirer certains d'entre eux pour rallier sa cause humanitaire de proximité. Elle est sans doute l'une des rares professionnelles qui m'ont donné envie de continuer ce métier en allant vers une amélioration des conditions de considération des malades et des personnels…»
Pour la petite histoire, parmi les collègues d'Odyle au service Les Iris du Vinat', on trouvait
Graziella de Michele, une rockeuse dans l'âme, mais qui aura sa belle heure de gloire avec une douce chanson, le Pull over blanc, en 1986 (
Nostalgie).
Un bel article dans Le Progrès du 7 Janvier 2023, merci à Thomas Brugnot.
Juste une petite erreur de département au début…: ses premiers emplois, ça n'était pas en Haute-Loire mais en Saône-et-Loire (Sassenay, Givry…), c'est moins loin de sa Côte d'Or natale…
PS 1er Février 2023 : Un nouvel article du Progrès, avec interview de Henri Tachez, et donc consacré aux
Deux Masques et au théâtre…
Théâtre encore : On ajoute cette photo-montage (de 2018) de la troupe de la MJC de Vaugneray, qui parle d'elle-même…
Une vie artistique en toute légèreté…
Comédienne, peintre, poétesse, on pourrait même ajouter "chanteuse"! Odyle Collin à La Colline sur cette photo…! (à St-Symphorien-d'Ozon) vers 1974, en ré-incarnation de Piaf lors d'un radio-crochet (La Chance aux Chansons…?). Photo de l'ami Mario Gurrieri, "le photographe des stars"!
En 1974/75, Odyle aimait vivre la nuit, en chantant Piaf ou Bruant dans des bars ou des restaurants, quartier Saint-Jean principalement (Au Soleil ou à la Machonnerie entre autres…). Il pouvait même lui arriver parfois d'aller directement au boulot au Vinatier au petit matin. Notre relation a spontanément (et heureusement, mais sans un reproche) mis un terme à ces "errances nocturnes"…
En fait Odyle n'a jamais tiré aucune vanité de toutes ses activités artistiques, quelles qu'elles soient (théâtre, peinture, poésie, chanson…), qu'elle pratiquait en toute légèreté (ce qui ne signifie ni manque de sérieux ni absence de profondeur), c'était juste que ça lui plaisait de faire ça…
C'est l'ami
Bernard Gouttenoire,
le critique d'art (et celui qui avait organisé l'expo "fondatrice" de 1975 réunissant Odyle et Serge), qui dans les années 2010, l'avait poussée à exposer ses nouveaux tableaux et à en placer certains dans les ventes aux enchères qu'il organisait. Elle en était ravie bien sûr, mais n'aurait jamais vraiment œuvré elle-même pour une quelconque "reconnaissance"!
SD
Private corner…
PS de fin 2023, après beaucoup d'hésitations on ajoute ce "pêle-mêle" de photos d'Odyle, composé rapidement, et amoureusement sans doute, puisque de nature quelque peu intime et même sexy (en souhaitant ne choquer personne…). Des portraits, de 1975 à 2009, des regards qui pétillent, des sourires qui en disent long (voir la photo du haut de cette page, la Joconde à côté…). Mais dès les années 2010, la maladie était devenue progressivement visible sur son visage, et je préfère bien sûr me souvenir de celui d'avant… Avec toutes ces petites choses qui lui collaient à la peau : le café et la cigarette, le menton dans la paume droite (son côté Adjani…?!), les bagues énormes, le bandeau dans les cheveux, le lipstick rose brillant… Odyle, tu nous manques tellement… SD.
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